Qu’est-ce que le Crédit d’Impôt Recherche et qui peut en bénéficier ?
Le Crédit d’Impôt Recherche (CIR) est un dispositif fiscal mis en place pour encourager l’investissement des entreprises dans la recherche et développement (R&D). Il permet de déduire du montant de l’impôt sur les bénéfices une part importante des dépenses de R&D engagées au cours de l’exercice.
Créé en 1983, le CIR est aujourd’hui l’un des principaux leviers de soutien public à l’innovation en France. Il s’applique à toutes les entreprises, quels que soient leur taille, leur statut juridique ou leur secteur d’activité, dès lors qu’elles mènent des travaux visant à lever des verrous scientifiques ou technologiques.
En France métropolitaine, le taux standard du Crédit d’Impôt Recherche (CIR) est de 30 % des dépenses éligibles jusqu’à 100 M€, puis 5 % au-delà. En outre-mer, un taux bonifié de 50 % peut s’appliquer sous conditions.
Le crédit peut être imputé sur l’impôt dû, ou, en cas d’excédent, remboursé dans certaines situations, notamment pour les jeunes entreprises innovantes (JEI), les PME au sens communautaire ou les entreprises nouvelles. Les autres entreprises peuvent constituer une créance fiscale reportable sur trois ans.
Les types d’entreprises concernées par le dispositif
Le Crédit d’Impôt Recherche (CIR) s’adresse à toutes les entreprises industrielles, commerciales ou agricoles imposées selon un régime réel, qu’elles soient assujetties à l’impôt sur les sociétés (IS) ou à l’impôt sur le revenu (IR).
Aucune condition de taille ou de secteur n’est imposée : les PME, ETI, grands groupes, start-ups et entreprises unipersonnelles peuvent y prétendre, dès lors qu’elles réalisent des opérations éligibles. Le dispositif est également accessible aux jeunes entreprises innovantes (JEI), aux sociétés en cours de développement technologique, ou encore aux entreprises étrangères disposant d’un établissement stable en France.
Astuce d’expert : L’éligibilité ne dépend ni de la réussite commerciale du projet, ni de son aboutissement. Même un échec technologique peut ouvrir droit au CIR, à condition de démontrer une véritable démarche de recherche.
Activités et projets éligibles au titre de la R&D
Pour ouvrir droit au CIR, les projets doivent relever de la recherche fondamentale, de la recherche appliquée ou du développement expérimental, selon les critères définis par le Manuel de Frascati (OCDE). Trois conditions doivent être réunies : un progrès scientifique ou technique visé, un projet comportant une incertitude technique, et une démarche structurée de R&D.
Les domaines concernés couvrent tous les secteurs : biotechnologie, logiciel, électronique, chimie, mécanique, énergie, etc. Un projet informatique peut par exemple être éligible s’il implique la création de nouveaux algorithmes ou architectures techniques inédites.
Attention : La simple amélioration de fonctionnalités ou la personnalisation d’un produit existant ne suffit pas. L’administration exige une rupture ou une avancée technique objectivable.
Quelles dépenses sont prises en compte dans le calcul du CIR ?
Les salaires et charges des personnels de recherche
Les rémunérations des chercheurs, ingénieurs et techniciens directement impliqués dans les projets R&D sont intégralement éligibles, charges sociales comprises. Le calcul inclut une fraction des frais de fonctionnement, évaluée forfaitairement à 43 % pour les exercices antérieurs à 2025, puis à 40 % pour les dépenses engagées à compter du 1ᵉʳ janvier 2025.
Bon à savoir : Seuls les personnels affectés aux activités R&D sont pris en compte. Le temps passé doit être tracé, justifié et documenté (fiches de temps, organigrammes projets, feuilles de présence).
La sous-traitance en recherche et développement
Les travaux confiés à des organismes agréés par le MESRI sont éligibles, dans la limite de 10 M€ par an. Il peut s’agir de laboratoires publics, de prestataires privés agréés CIR ou CII, ou d’établissements d’enseignement supérieur.
Lorsque la sous-traitance est confiée à un organisme non agréé, les dépenses sont exclues du calcul, même si le projet est éligible par ailleurs.
Les dotations aux amortissements des équipements R&D
Les équipements, matériels ou installations utilisés pour la recherche peuvent être pris en compte à hauteur de leur dotation aux amortissements annuelle, à condition qu’ils soient utilisés exclusivement pour les activités R&D.
Exemples : équipements de laboratoire, serveurs dédiés au calcul scientifique, bancs d’essai, logiciels spécifiques.
Attention : En cas d’usage mixte (recherche + production), seule la quote-part utilisée pour la R&D est éligible, sur justificatif.
Les frais liés aux brevets, à la veille technologique et aux normalisations
Depuis le 1er janvier 2025, la réglementation du Crédit d’Impôt Recherche (CIR) a été recentrée sur les dépenses directement liées à l’exécution des travaux de R&D. Plusieurs frais historiquement éligibles ne le sont désormais plus.
Les frais suivants sont exclus du calcul du CIR pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2025 :
- Frais de dépôt, de maintenance ou de défense de brevets ou de certificats d’obtention végétale (COV)
- Dépenses de veille technologique, y compris les abonnements à des bases de données scientifiques ou techniques
- Frais de documentation, traduction ou protection juridique associés aux brevets
Ces dépenses restent éventuellement déductibles sur d’autres plans fiscaux, mais ne sont plus comptabilisées dans l’assiette du CIR.
Le seul poste encore admis en 2025 concerne les frais de participation à des opérations de normalisation scientifique ou technique, sous réserve de conditions précises :
- Les travaux doivent contribuer à l’élaboration de normes officielles reconnues (AFNOR, ISO, CEN, etc.).
- Sont éligibles :
- Les salaires et charges du personnel affecté à ces missions
- Un forfait complémentaire égal à 30 % des salaires concernés, destiné à couvrir les frais annexes (déplacements, réunions, documentation)
- Toutefois, seule la moitié (50 %) de ce montant total (salaires + forfait) est admise dans la base de calcul du CIR.
Exclusions : quelles dépenses ne sont pas éligibles ?
Certaines charges, bien que liées à des projets techniques, sont systématiquement exclues :
- Dépenses commerciales, marketing ou de design
- Coûts de certification ou de mise sur le marché
- Temps passé à la gestion administrative
- Sous-traitance non agréée
- Achats de matériel sans lien direct avec la R&D
Quelle est la formule de calcul du CIR et comment l’appliquer ?
La base de calcul : additionner les dépenses éligibles
La première étape consiste à totaliser toutes les dépenses de R&D éligibles sur l’exercice fiscal : salaires, sous-traitance agréée, amortissements, etc. À cela s’ajoutent, le cas échéant, les frais de fonctionnement forfaitaires (40 % des salaires R&D + 75 % des dotations aux amortissements).
Exemple :
- Salaires R&D : 100 000 €
- Dotations aux amortissements : 10 000 €
- Frais de fonctionnement forfaitaires = (100 000 × 40 %) + (10 000 × 75 %) = 40 000 + 7 500 = 47 500 €
Base de calcul totale = dépenses éligibles + frais de fonctionnement
Le taux du CIR en fonction du montant investi
Le taux appliqué dépend du volume de dépenses :
Montant des dépenses R&D | Taux de CIR applicable |
Jusqu’à 100 M€ | 30 % |
Au-delà de 100 M€ | 5 % |
Pour les entreprises ultramarines, un taux bonifié de 50 % peut s’appliquer, sous conditions.
Exemple chiffré concret de calcul (avec mise en situation)
Contexte : Une PME réalise les dépenses suivantes :
- Salaires R&D : 150 000 €
- Sous-traitance agréée : 40 000 €
- Amortissements : 20 000 €
- (attention, les dépenses de veille technologique ne sont plus éligibles en 2025)
Calcul :
- Frais de fonctionnement : (150 000 × 40 %) + (20 000 × 75 %) = 60 000 + 15 000 = 75 000 €
- Dépenses totales éligibles = 150 000 + 40 000 + 20 000 + 75 000 = 285 000 €
- CIR = 285 000 × 30 % = 85 500 €
Cas spécifiques : PME innovantes, entreprises ultramarines, JEI
Certaines situations modifient la méthode ou les avantages :
- Jeunes Entreprises Innovantes (JEI) : remboursement immédiat du CIR, sans attendre l’imputation sur l’IS/IR.
- Entreprises ultramarines : taux de 50 % (jusqu’à 100 M€), majoré dans certains cas.
- Sociétés bénéficiant d’aides publiques : certaines subventions doivent être déduites de la base de calcul.
Attention, les aides publiques (BPI, ADEME, Europe) peuvent réduire la base éligible si elles financent directement des projets R&D. Il faut ajuster le calcul en conséquence.
Bon à savoir : certaines de ces aides relèvent du régime dit des “aides de minimis”, plafonnées à 300 000 € sur trois exercices fiscaux pour une même entreprise. Leur cumul avec le CIR est possible, mais ces aides doivent être exclues de la base de calcul du crédit d’impôt si elles financent les mêmes dépenses.
Conseils pour documenter rigoureusement ses calculs
Chaque montant doit être justifié, traçable et documenté :
- Tableaux récapitulatifs des dépenses
- Justificatifs des temps passés (feuilles de temps, plannings)
- Devis et factures des sous-traitants
- Liste des équipements avec taux d’usage R&D
- Dossier technique associé au projet (objectifs, verrous, livrables)
Quelles sont les étapes pour déclarer son Crédit d’Impôt Recherche ?
Le formulaire 2069-A-SD : contenu, rôle et annexes
Le formulaire 2069-A-SD est la pièce maîtresse de la déclaration. Il doit être rempli par toute entreprise sollicitant le CIR, y compris en l’absence d’impôt à payer (cas des JEI ou entreprises déficitaires).
Il détaille :
- Les dépenses éligibles par poste
- La répartition des projets de R&D
- Les sous-traitants agréés utilisés
- L’éventuelle déduction des subventions publiques
Où et quand envoyer sa déclaration ?
Le formulaire 2069-A-SD est déposé avec la liasse fiscale, dans les délais légaux applicables selon le régime de l’entreprise (IS ou IR). En général, cela correspond à mi-mai pour un exercice clos au 31 décembre, sauf cas particuliers.
Attention : Un dépôt tardif peut entraîner l’irrecevabilité du crédit pour l’année concernée. Aucun rattrapage n’est possible après le délai légal.
Intégration dans la liasse fiscale et traitement par l’administration
Le montant du CIR est intégré au niveau du formulaire 2065 (déclaration de résultats IS) ou du formulaire 2031 (IR). Il s’impute sur l’impôt dû, ou constitue une créance reportable sur trois ans.
Dans les faits, l’administration fiscale effectue un contrôle automatique, souvent suivi d’un examen sur pièces pour les montants significatifs ou les premières demandes.
Coup de pouce : Anticipez un éventuel contrôle en joignant systématiquement une note technique synthétique sur chaque projet déclaré.
Modalités de remboursement ou d’imputation du CIR
Deux cas de figure existent :
- Si l’entreprise est imposable, le CIR vient en déduction de l’impôt dû.
- Si elle est non imposable (déficit, JEI), le CIR devient une créance fiscale remboursable, sur demande via le formulaire 2573-SD.
Le remboursement est en principe effectué sous 3 à 6 mois. Il peut être retardé si un contrôle est engagé.
L’administration fiscale dispose d’un délai de reprise de 3 ans pour contester une déclaration CIR, comme pour les autres créances fiscales (article L.169 du LPF).
Comment éviter les erreurs courantes dans le calcul du CIR ?
Mauvaise sélection des projets R&D ou des dépenses
Le premier piège réside dans l’éligibilité des projets. Trop d’entreprises déclarent des actions techniques sans réelle incertitude scientifique ou rupture technologique, ce qui les disqualifie.
De même, certaines dépenses annexes (conseil, production, tests clients) sont souvent indûment intégrées à la base de calcul.
Astuce d’expert : Basez-vous strictement sur les critères du Manuel de Frascati. Chaque projet doit répondre à trois conditions : nouveauté, incertitude, démarche structurée.
Sous-estimation ou surévaluation des montants déclarés
Les erreurs de calcul proviennent souvent d’une mauvaise structuration des données internes : salaires mal ventilés, sous-traitance non filtrée, amortissements mal imputés.
Une sous-estimation fait perdre un avantage fiscal. Une surévaluation peut déclencher un contrôle.
Absence de documentation scientifique ou technique
Le dossier technique est souvent négligé. Or, en cas de contrôle, l’entreprise doit prouver :
- Les verrous technologiques rencontrés
- Les méthodes mises en œuvre
- Les résultats attendus ou obtenus
Un simple descriptif commercial ou marketing ne suffit pas. Il faut une traçabilité scientifique, rédigée avec précision.
Bon à savoir : l’administration fiscale s’appuie de plus en plus sur des audits techniques CIR, menés en collaboration avec le MESRI. Ces contrôles portent autant sur la cohérence des dépenses que sur la validité scientifique des projets déclarés. Ils impliquent un examen approfondi des livrables R&D, de la documentation technique et de la conformité aux critères du Manuel de Frascati. Un dossier bien structuré en amont limite le risque de requalification et renforce la légitimité des montants déclarés.
Dépôt tardif ou formulaire mal rempli : conséquences fiscales
Un oubli ou une erreur dans le formulaire 2069-A-SD peut rendre le CIR irrecevable pour l’exercice concerné. De même, une déclaration déposée hors délai n’est jamais récupérable.
Certaines entreprises renseignent également de mauvais codes de dépenses, ou omettent la déduction d’aides publiques.
Pourquoi se faire accompagner pour sécuriser sa démarche CIR ?
L’importance d’un accompagnement technique et fiscal
Un bon accompagnement CIR combine deux expertises complémentaires :
- Technique : pour analyser les projets à la lumière du Manuel de Frascati, formuler les verrous scientifiques, structurer les livrables.
- Fiscale : pour sécuriser les calculs, remplir les formulaires, intégrer le CIR dans la liasse, anticiper les contrôles.
Cette approche évite les erreurs d’interprétation, optimise les montants déclarés et réduit le risque de rejet par l’administration.
Critères pour bien choisir son cabinet spécialisé
Tous les cabinets ne se valent pas. Voici les points à vérifier avant de confier votre CIR :
- Connaissance du terrain : expertise sectorielle (numérique, pharma, industrie…)
- Équipe mixte : fiscalistes + ingénieurs
- Expérience du contrôle fiscal : capacité à défendre les dossiers
- Transparence tarifaire : honoraire au forfait ou au succès ? Taux appliqué ?
- Outils internes : méthodologie de calcul, gestion documentaire, fiches projets
Birdinnov, spécialiste du financement public de l’innovation, accompagne les entreprises innovantes avec une méthode rigoureuse, des livrables exploitables et une veille légale constante.
Rôle de l’expert-comptable, du conseil en innovation ou de l’agent fiscal
Chacun a un rôle précis :
- L’expert-comptable s’assure de la cohérence financière et de l’intégration dans la liasse.
- Le conseil en innovation identifie les projets R&D, formule les livrables et documente les travaux.
- L’agent fiscal référent (SIP ou SIE) peut être sollicité via un rescrit CIR pour sécuriser un projet en amont.
Le bon accompagnement repose sur la coordination de ces acteurs autour d’une méthode claire.
Limiter les risques en cas de contrôle par l’administration
Les contrôles CIR sont techniques, rapides et parfois sévères. Un accompagnement structuré permet de :
- Préparer un dossier technique solide, conforme aux attentes de l’administration
- Justifier chaque dépense déclarée, avec pièces à l’appui
- Répondre dans les délais aux demandes de l’administration
Optimiser son CIR : bonnes pratiques et outils à connaître
Structurer sa documentation R&D en amont
La qualité du dossier technique conditionne la recevabilité du CIR. Plutôt que de compiler à la dernière minute, intégrez la documentation dès le lancement du projet :
- Objectif scientifique ou technique
- Verrou ou incertitude identifiée
- Méthodologie envisagée
- Résultats attendus / obtenus
Un suivi mensuel ou trimestriel des projets facilite la production de fiches projets CIR, prêtes à être mobilisées en cas de contrôle.
Utiliser un outil de suivi des projets éligibles
Les entreprises les plus structurées utilisent des outils internes pour :
- Traquer les heures passées par projet
- Lier les dépenses aux livrables scientifiques
- Centraliser les pièces justificatives
- Générer automatiquement des tableaux de calcul
Ces outils facilitent la consolidation des données lors de la déclaration et sécurisent l’archivage.
Planifier ses déclarations pour éviter les erreurs
Chaque échéance doit être anticipée : collecte des données, extraction comptable, contrôle des seuils, dépôt du 2069-A-SD, demande de remboursement. La gestion en mode “projet” limite les oublis et les surcharges en fin d’exercice.
Un retroplanning CIR clair (clôture, date limite, période de consolidation) permet une meilleure collaboration entre la R&D, la comptabilité et les conseils externes.
Intégrer le CIR dans sa stratégie d’innovation à long terme
Le CIR ne doit pas être une simple opération fiscale, mais un levier d’investissement stratégique. Il peut servir à :
- Financer l’embauche de profils techniques
- Augmenter la capacité de prototypage
- Investir dans de nouveaux outils ou logiciels de R&D
- Lancer des projets à plus fort risque technologique
Astuce d’expert : Créez un tableau de bord R&D/CIR annuel croisant les données financières et les objectifs stratégiques pour piloter vos priorités d’innovation.
Sources : Formulaire 2069-A-SD, Formulaire n°2065-SD, Formulaire n°2031-SD, Formulaire n°2573-SD, Article L.169 du LPF